Des bidonvilles aux banlieues : spatialite et desespoir dans la France contemporaine1

Of slums and banlieues: spaciality and hopelessness in contemporary France

Hervé TCHUMKAM

Southern Methodist University, USA

atchumkam[at]gmail.com

Impossibilia. Revista Internacional de Estudios Literarios. ISSN 2174-2464. No. 19 (mayo 2020). Monográfico. Páginas 72-92. Artículo recibido 26 septiembre 2019, aceptado 08 mayo de 2020, publicado 30 mayo 2020

Résumé : De la marche pour l’égalité et contre le racisme en 1983 aux émeutes de banlieues une vingtaine d’années plus tard, les citoyens français issus de l’immigration africaine ont multiplié les tentatives de visibilité sur la scène publique française. Au cœur de ces mouvements de manifestation militante, se trouvent les problématiques de discrimination et de ségrégation. Cet article s’intéresse aux rapports existants entre la spatialité et le désespoir dans la France depuis une trentaine d’années. M’appuyant sur les espaces que sont les bidonvilles et les cités de transit, puis les banlieues, je propose une analyse de la relation entre les immigrés africains et leur descendance d’une part, et la société française d’autre part. A partir d’une lecture des romans Le thé au harem d’Archi Ahmed de Mehdi Charef (1983) et Banlieue noire de Thomté Ryam (2006), je maintiens que l’occupation et la gestion de l’espace sont des marqueurs de la disqualification sociale des jeunes afro-descendants en France de nos jours. Le but ultime de cette réflexion est de proposer que le paradigme colonial est nécessaire à la compréhension des manières dont la vie dans les espaces d’exclusion en France est une réflexion permanente sur le paradoxe de l’exclusion inclusive qui structure les rapports sociaux.

Mots-clés : banlieues, bidonvilles, spatialité, désespoir, représentation

Abstract: From the 1983 March for equality and against racism to the 2005 urban riots in France, the African diaspora has multiplied attempts to gain some visibility in the French public sphere. These militant mobilizations happened in response to discrimination and segregation. This paper concerns itself with the relation between spatiality and distress in France during the last three decades. Building on shanty towns, slums and the banlieues, I offer an interpretation of the relation between African immigrants and their descendants on the one hand, and the French society on the other. Through a reading of Mehdi Charef’s Le thé au Harem d’Archi Ahmed (1983) and Thomté Ryam’s Banlieue noire (2006), I maintain that the management of space is an indicator of the social disqualification that afro descendants suffer from in France nowadays. It is my ultimate contention that the colonial paradigm is of paramount importance in understanding the ways in which daily life in France is a permanent thinking on the paradoxical inclusive exclusion that structures social relations.

Keywords: banlieues, slums, space, despair, representation

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Entre octobre et décembre 1983, les jeunes français descendants d’immigrés africains faisaient leur entrée fracassante sur la scène française à la faveur de la marche pour l’égalité et contre le racisme, marche rebaptisée et mieux connue sous le nom de « marche des beurs ». Cette marche qui partit de Marseille et se termina par une entrée retentissante dans la ville de Paris faisait suite à un constat alarmant, à savoir la multiplication d’actes racistes visant les citoyens français issus de l’immigration, pour reprendre une expression très en vogue dans le répertoire linguistique de la construction identitaire dans la France contemporaine. S’il est vrai qu’en son temps cette demande de visibilité secoua la France, il est encore plus pertinent de souligner que l’oubli, le silence et l’indifférence semblent avoir été les réponses formulées par la société française à cette demande qui avait par la suite été également récupérée par des groupuscules qui n’avaient pour objectif que de satisfaire leurs intérêts particuliers, au détriment de demandes fondées de justice et d’égalité formulées par les leaders de cette jeunesse en crise. On se souvient par exemple, pour illustration, de l’habile récupération politique et médiatique de la marche par l’association SOS-Racisme. Une vingtaine d’années après la marche de 1983, les jeunes issus de l’immigration africaine en France reviendront de manière encore plus remarquable sur la scène et s’imposeront à la conscience collective française avec les émeutes de 2005 dont le bilan et la particularité les distinguent de toutes les autres émeutes qu’avait connues la France durant les années précédentes : ces émeutes se singularisent non seulement par leur durée, mais par le nombre de villes qui ont été affectées. Et comme deux décennies plus tôt, la réponse du gouvernement français se résumait au silence, en plus de la répression qui entrait désormais en ligne de compte comme « arme miraculeuse » pour le retour à l’ordre, sans que jamais il n’y ait eu une volonté politique réelle de comprendre les causes profondes de ces manifestations de violence. On observe donc ainsi clairement que les problèmes qui étaient soulevés au début des années 1980 refont surface trente ans plus tard, un peu comme si les populations concernées étaient une masse d’autant plus inexistante que leurs nombreuses demandes de visibilité sociale sont demeurées sans autre réponse que le silence et la répression. Fort de ce constat, cet article se fixe pour objectif de mettre en évidence les contours, raisons et possibles explications de l’idée de statu quo qui semble caractériser la situation sociale des jeunes citoyens français descendants de l’immigration africaine. Pour ce faire, je partirai d’une réflexion sur l’espace comme élément opérateur de jonction et de disjonction, des bidonvilles des années 1960 jusqu’aux banlieues de nos jours. Cet article ne traite pas spécifiquement de l’expérience de l’immigration venue d’Afrique noire comme le fait Dominic Thomas dans Black France (2006) ou Odile Cazenave dans Afrique sur Seine (2003) entre autres, encore moins se limite-t-il à une analyse des voix de la communauté nord-africaine en France, ainsi que l’ont remarquablement fait Alec Hargreaves dans Immigration and Identity in Beur Fiction (1991) et Michel Laronde dans Autour du roman beur (1993), pour ne citer que ces éminents critiques littéraires. Cet essai se veut plutôt une étude du bidonville et de la banlieue en tant qu’espaces de la relégation où se trouvent et dans lequel se reconnaissent non seulement des descendants d’immigrés d’Afrique Sub-saharienne, mais également les marginaux descendants de l’immigration Nord-Africaine en France.

Reprenant à mon compte la notion théorique de minorités postcoloniales post-migratoires que proposent Kathryn Kleppinger et Laura Reeck à l’introduction de leur ouvrage collectif Post-Migratory Cultures in Postcolonial France (2018), je voudrais cerner les manières dont Le thé au Harem d’Archi Ahmed, de Mehdi Charef (1983) et Banlieue noire, de Thomté Ryam (2006), quoique publiés l’un deux décennies (vingt-trois ans exactement) après l’autre, se font écho et se donnent à lire comme une poétique du désespoir de toute une génération de « sans- parts », autrement dit, les minorités visibles rendues invisibles par le système politique en place en France depuis plusieurs décennies. « Convaincu qu’il n’est ni arabe ni français depuis bien longtemps », Madjid, le protagoniste du roman de Mehdi Charef se définit comme « fils d’immigrés, paumé entre deux cultures, deux histoires, deux langues, deux couleurs de peau, ni blanc ni noir, à s’inventer ses propres racines, ses attaches, se les fabriquer » (Charef, 1983 : 17). Ainsi est planté le décor qui ouvre Le thé au Harem d’Archi Ahmed, et qui informe le lecteur sur la condition non seulement des immigrés mais de leurs enfants, au tournant des années 1980 en France. Ce roman de Mehdi Charef, pionnier de ce qui deviendra la littérature de banlieue, raconte les aventures d’un groupe de jeunes de cité en France, avec une emphase particulière sur la difficile capacité qu’éprouvent ces jeunes soit à s’insérer, soit à se penser comme chapitres à part entière de la narration de la nation française. C’est qu’en réalité et aux origines, se trouve le mouvement effectué par leurs parents des colonies vers la métropole, à la recherche d’un avenir meilleur mais souvent aussi pour servir la France et sauvegarder l’intérêt de la mère patrie, mouvement dont le film Indigènes, de Rachid Bouchareb (2006) a donné la représentation fictionnelle peut-être la plus poignante, ainsi que l’a suggéré Alec Hargreaves (2007) dans son article intitulé « Indigènes : A Sign of the Times ». En effet, ce film retrace l’itinéraire, l’héroïsme mais aussi les mésaventures des soldats de l’empire colonial français appelés pour se battre aux cotés de la France contre l’Allemagne nazie.

Ce rappel historique provenant du film de Bouchareb n’est pas inutile, et il permet directement de souligner deux facteurs importants dans la compréhension de la situation des jeunes d’origine africaine comme Madjid et Sébastien, respectivement protagonistes de Le thé au harem d’Archi Ahmed et Banlieue noire. En premier lieu, dans le roman de Mehdi Charef, on observe une stigmatisation des immigrés originaires d’Afrique et de leurs descendants, alors même que les autres immigrés européens et leurs enfants échappent pour ainsi dire à la catégorie de l’immigration, du moins dans le discours officiel et le traitement quotidien réservé aux uns et aux autres. Ensuite, et en conséquence du premier constat, tout se passe en effet comme si, incapable de faire face à ses gestes coloniaux, la France s’est depuis plusieurs décennies lancée dans une entreprise de gommage systématique de l’Histoire, quand il ne s’agit pas simplement de la célébration de la grandeur coloniale. Ainsi peut-on comprendre la loi du 23 février 2005 qui visait à célébrer les bienfaits de la colonisation et à raviver la gloire impériale, à la fois comme devoir pour la nation et comme orientation normative des recherches académiques. Dans son article 1, cette loi souligne que « la Nation exprime sa reconnaissance aux femmes et aux hommes qui ont participé à l’œuvre accomplie par la France dans les anciens départements français d'Algérie, au Maroc, en Tunisie et en Indochine ainsi que dans les territoires placés antérieurement sous la souveraineté française ». Puis dans l’article 4, particulièrement controversé, on peut lire que

les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, et accordent à l'histoire et aux sacrifices des combattants de l'armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droit (2005).

Cette œuvre de réécriture de l’Histoire s’articule en effet autour d’une amnésie qui est très souvent justifiée par le prétexte du respect des lois de la République et la nécessité de protéger celle-ci de l’invasion des « barbares », ou plutôt de la montée des communautarismes pour reprendre un mot favori de la rhétorique de la ségrégation en cours dans la France de nos jours. De fait, cette manipulation de la mémoire historique est d’autant plus paradoxale que, comme dit le philosophe Pierre Tevanian,

c’est le plus souvent au nom de la République et de sa supériorité (sur les « féodalités » africaines par exemple, ou les juridictions musulmanes) que des hiérarchies racistes ont été construites au temps de la colonisation, et c’est au nom de la République qu’est maintenu le statu quo inégalitaire : c’est toujours « la République » qui est invoquée, comme un ex-voto, pour rappeler à l’ordre les immigrés ou les Français « de couleur » lorsqu’ils se rassemblent et s’organisent afin de combattre le racisme et les discriminations (Tevanian, 2007 : 7-8).

Banlieue noire de Thomté Ryam pour sa part s'ouvre par une prolepse importante qui plonge le lecteur dans le texte en mettant en exergue dès le début une problématique importante dans la France postcoloniale : « penser aux conséquences de se masquer les causes des problèmes » (Ryam, 2006 : 11). Cette mise en garde qui fonctionne davantage comme une imprécation que comme un simple constat mobilise l’attention du lecteur-récepteur, et par le même geste, met en garde la France sur le fait que la décadence progressive de la société française est une conséquence de cette pratique du détournement et du gommage. Autrement dit, le roman suggère qu’il importe, en cas de crise, de se pencher sur les causes du problème plutôt que de se limiter à trouver des solutions ponctuelles. Le roman de Thomté Ryam qui relate les aventures de Sébastien, jeune homme vivant dans une cité près de Paris, se présente sous la forme d’un journal, et la narration prend les allures d'une chronique à l’intérieur de laquelle les événements sont datés. Les descriptions du narrateur, de même que ses réflexions sur la banlieue, sont hautement significatives. En effet, l'adjectif « noire » dans le titre « Banlieue noire » ne renverrait pas à une catégorisation raciale de la banlieue, mais fonctionne plutôt comme adjectif épithète. « Noire » renverrait ainsi à la nuit, aux ténèbres, au manque d’horizon, bref en un mot, au désespoir.

Tel est en effet le contexte dans lequel se situent les protagonistes de Mehdi Charef et Thomté Ryam, dont les tribulations se résument aux conséquences d’une oscillation entre invitation et rejet, mouvement qui, pourrait-on dire, caractérise la condition de l’immigré dans la société française au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. On dirait alors que la misère qui était à l’origine du flux migratoire des immigrés africains en France se retrouve également au bout de leur parcours dans la société française où les rêves s’effondrent brutalement. Il importe par ailleurs de s’attarder sur les conditions de vie de ces immigrés et de leurs enfants. Dans son documentaire intitulé Mémoires d’immigrés : l’héritage Maghrébin, structuré en trois parties entre pères, mères et enfants, Yamina Benguigui a montré, en donnant la parole aux immigrés et précisément à la génération des pères, comment les travailleurs immigrés étaient réduits à leur pure expression corporelle (le corps devenant ainsi doublement lieu d'inscription d'une condition sociale et unique moyen d'émergence des habitants des bidonvilles et plus tard de la banlieue) et promis au retour dans leur pays d’origine une fois leur besogne terminée. En clair, l’immigré est nécessaire en tant que force de production, mais en même temps, sa présence n’est pas souhaitée par le pays d’accueil, ou du moins elle n’est pas envisagée sur la durée. On constate donc que dans ce contexte d’invitation-rejet de l’immigré par la France, on a affaire à une reprise inédite et certainement déformée de la scène de la rencontre du Christ ressuscité avec Marie Madeleine dans la Bible, et dont Jean Luc Nancy a donné une remarquable interprétation philosophique dans son ouvrage Noli me tangere : essai sur la levée du corps (2003). La relation est claire entre la rencontre du Christ avec Marie Madeleine et celle, sempiternellement violente, de l’Afrique avec la France. De même que le couple Jésus / Marie-Madeleine est caractérisé dans l’hagiographie par la violence ou le désir, voire les deux, le couple Afrique-France participe de la même contradiction, dans les deux sens. L’occident est une passion pour l’Afrique, aux deux sens du mot passion, et inversement, l’Afrique est le temple du désir de la France. Ceci permet de comprendre les circonstances dans lesquelles le père de Madjid dans le roman de Mehdi Charef est réduit à un état presque végétatif après un accident de travail. Son père « a la même éternelle expression dans le regard, un mélange de vide et de lointain […] le papa a perdu la raison depuis qu’il est tombé du toit qu’il couvrait. Sur la tête » (Charef, 1983 : 41). À partir de l’état dans lequel se trouve le père du protagoniste, on pourrait reprendre à bon compte le mouvement de la pensée de Jean-Luc Nancy, évoquée ci-dessus.

Pour le philosophe, le personnage de Marie-Madeleine est fait pour troubler aux deux sens du mot la légende religieuse. En récupérant cette interprétation, je voudrais savoir quel type de résurrection ce rapport ambigu entre la France et ses fils immigrés afro-descendants augure. Car si en réalité le couple Jésus-Marie Madeleine dans la pensée de Nancy est comparable au couple France-Afrique, serait-ce donc aussi que l’existence en France des immigrés africains et de leur descendance est faite pour troubler le sens de son identité ? On observe dans le documentaire de Benguigui que déjà à l’époque des travailleurs immigrés, c’est- à-dire vers le début des années 1950, se posait avec acuité le problème du logement pour ces travailleurs venus de l’empire colonial français en Afrique. En plus d’être littéralement privés de droits et d’être contrôlés par le gouvernement français, les travailleurs immigrés étaient réduits à vivre dans des cités de transit et autres bidonvilles, avant d’être progressivement déplacés vers les banlieues qui existent de nos jours. Plus tard, avec la pratique du regroupement familial, les familles des travailleurs immigrés les rejoignent en France, occasionnant une autre masse au départ indésirable avec laquelle la France devait être obligée de composer. La dialectique de l’appel et du rejet dont j’ai parlé plus haut, crée dès lors les conditions du rejet de « l’autre ». Du fait que l’immigré est désormais perçu comme menace à la cohésion nationale dans l’esprit de nombre de Français, se mettent progressivement en place ce que Pascal Blanchard et Nicolas Bancel ont nommé « les nouveaux espaces de l’exclusion » : la banlieue. Pour eux, la banlieue est « devenue, à travers les médias, les films, les discours politiques, une terra incognita, et un espace quasi-ethnique […] lieux appréhendés comme des enclaves au sein de la République, des ‘ points noirs ’, des espaces à reconquérir ou à pacifier » (Blanchard et Bancel, 1998 : 81).

La description des bidonvilles dans Le thé au Harem d’Archi Ahmed, tout comme la représentation de l’espace banlieue dans Banlieue noire, est révélatrice des manières dont l’occupation ou la division se traduit par la mise à l’écart de ces populations venues d’Afrique, d’abord, puis de leur progéniture. Car si l’on part du principe que l’espace n’existe que parce qu’il est rempli, alors l’existence des individus qui peuplent cet espace sera en fonction des manières dont ils l’occupent, ainsi que des modalités de leur présence à l’intérieur de ce lieu. Le narrateur de Mehdi Charef décrit le lieu d’habitation de Madjid et ses parents comme étant « le plus cruel des bidonvilles de toute la banlieue parisienne. Des vraies favelas brésiliennes, le soleil en moins, sans la musique endiablée pour crier au secours » (Charef, 1983 : 115) dans lequel « les enfants jouent avec une petite graine d’insouciance dans la misère, dans la boue, sous la fumée dense et épaisse que crachent les cheminots » (1983 : 117). Le narrateur de Thomté Ryam quant à lui résume son quartier en une « zone sensible, un quartier d’une rare saleté » (Ryam, 2006 : 14) qui « pue la faim, un foutoir où cohabitent 15.000 personnes. Des portées de Noirs et d’Arabes en majorité, mais aussi des Chinois, des Turcs, des Pakistanais, des Français perturbés, des gens du voyage qui ne veulent plus voyager » (2006 : 33). Le bidonville, tout comme la banlieue, ainsi qu’on le voit dans les extraits ci-dessus cités, c’est l’espace par excellence de l’humiliation et de l’échec.

D’une manière, on dirait que la cité de transit, qui était un lieu temporaire, a non seulement été érigée en unique lieu permanent de mobilité, puisque certaines cités de transit étaient entourées de fils barbelés, mais aussi sa logique a été prolongée dans ce qui s’appelle désormais les banlieues. Si les banlieues de nos jours sont apparemment moins « surveillées » que les cités de transit, il est tout de même à noter que celles-ci étaient bien souvent gérées par d’anciens militaires revenus d’Algérie, et que le pouvoir politique estimait être les plus aptes à surveiller ces étrangers étant donné qu’il les connaissait pour avoir vécu avec eux dans les colonies, ainsi que le révèle le documentaire de Yamina Benguigui.

À propos du traitement des immigrés et de leurs descendants, la sociologue Nacira Guénif-Souilamas a remarqué un prolongement de la logique coloniale :

Le parallélisme entre le traitement colonial des colonisés et le traitement des Français d’ascendance coloniale renvoie à la même matrice essentialiste et normative : elle consiste à ne reconnaître que le semblable et à rejeter la responsabilité des dommages et dénis subis sur ceux qui en sont les victimes, parce qu’ils sont marqués du stigmate d’une différence indélébile (Guénif-Souilamas, 2005 : 212).

On observe alors, dans les bidonvilles d’alors et même encore dans les banlieues de nos jours, une cohabitation d’autant plus difficile que les rapports sociaux semblent d’une part prédéfinis par un ensemble de prédéterminations et de configurations qui, en tout état de cause, découlent d’une imagerie populaire héritée des stéréotypes coloniaux. Mehdi Charef inscrit les relations raciales dans son roman au cœur d’une tension perpétuelle, ainsi que l’attestent les différentes scènes qui laissent transparaître une figure de l’Arabe qui serait non seulement considéré comme un danger permanent, mais aussi un inadapté social. Dès les premières pages de Le Thé au Harem d’Archi Ahmed, à l’occasion d’une description de la cité comme d’un mouroir, l’auteur insère une scène fortement révélatrice. La rencontre entre Madjid et un autre personnage de race blanche, Levesque, atteste à suffisance de la nature de la perception de l’autre : l’ascenseur est inondé d’urines, et Madjid fait remarquer que si ce sont les chiens de blancs, par ailleurs utilisés comme armes dissuasives pour ces maghrébins, qui urinent dans les ascenseurs, pour Levesque « c’est les Arabes qui pissent dans l’ascenseur et dégradent le bâtiment » (Charef, 1983 : 12). A propos justement des chiens et de leur valeur fonctionnelle, le narrateur du même roman fait remarquer que ces blancs, maîtres de bergers allemands comme monsieur Pelletier, sont presque dans une posture de provocation, prêts à lâcher leurs chiens pour discipliner ces « étrangers » indésirables mais que la force du destin et l’ironie de l’Histoire ont installé dans un espace commun : le maître du chien frime, exulte, et l’animal devient donc agent de contrôle et de répression.

De manière un peu moins subtile, l’auteur de Banlieue noire met également en relief la difficulté voire l’impossibilité du vivre ensemble. Si dans les bidonvilles et cités de transit on se côtoie et les interactions individuelles sont rendues difficiles par la peur du barbare, dans la banlieue actuelle l’espace est quasiment divisé par un mode de rapport au pouvoir. Dans cet espace, dit le narrateur de Thomté Ryam, « le blanc est la couleur de la domination. Ce sont eux, en majorité, qui réussissent et nous, les plus foncés, qui échouons [] ce sont eux qui vivent dans les beaux quartiers et nous dans les endroits sordides » (Ryam, 2006 : 29). Ainsi, et face à cette quasi inexistence des habitants de banlieue, face à cette invisibilité d’autant plus préoccupante que les Noirs et Arabes constituent une minorité visible en France de nos jours, le train devient pendant un bref moment l’espace matériel et poétique de l’affirmation, voire de l’existence des jeunes descendants de l’immigration : « Il n’y a que dans les endroits comme le train où des gens comme moi peuvent prendre de l’ascendant sur des patrons » (2006 : 32), affirme Sébastien. La mention du chien et de son rôle dans la surveillance et la répression des jeunes descendants d’immigrés dans le roman de Mehdi Charef sont intéressantes au moins pour deux raisons. En premier, cette mention rappelle le rôle des chiens dans le contrôle des esclaves et dont la mise en fiction a été remarquablement faite par Patrick Chamoiseau dans son roman L’esclave vieil homme et le molosse (Chamoiseau, 1997). Ensuite, l’évocation du chien suggère une analogie profonde non seulement entre la banlieue et l’espace colonial où surveiller et punir était la règle, mais également entre banlieue et habitation esclavagiste.

Cette longue nuit de désespoir et de bannissement dans laquelle sombrent les immigrants et leurs enfants de cités de transit et de bidonvilles, tout comme leurs descendants dans les banlieues actuelles, Achille Mbembe a identifié ses origines dans son essai Sortir de la grande nuit. Il écrit :

La scène primordiale de cette brutalité et de cette discrimination a été la plantation sous l’esclavage, puis la colonie à partir du XIXe siècle. De manière tout à fait directe, le problème que posent le régime de la plantation et le régime colonial est celui de la fonctionnalité de la race comme principe d’exercice du pouvoir et comme règle de sociabilité. Dans le contexte d’aujourd’hui, convoquer la race, c’est appeler à une réflexion à propos du dissemblable, de celui ou celle avec qui l’on ne partage rien ou très peu de ceux ou celles qui, tout en étant avec nous, à côté de nous ou parmi nous, ne sont, en dernière analyse, pas des nôtres. Bien avant l’Empire, la plantation et la colonie constituaient un “ailleurs.” Elles participaient du “lointain” et de l’étrangeté—d’un au-delà des mers. Et c’est presque toujours en tant qu’extrêmes limites qu’elles apparaissent dans l’imaginaire métropolitain. Aujourd’hui, la plantation et la colonie se sont déplacées et ont planté leurs tentes ici même, hors les murs de la Cité (en banlieue) (Mbembe, 2010 : 94).

On le voit, la plantation et la colonie, ou du moins les logiques qui déterminaient leur organisation et leur gestion, ont été déplacées et se retrouvent désormais dans l’hexagone même. Mais plus intéressant, le chien dont il est question dans la plantation et dans le roman de Mehdi Charef semble lui-même être passé de l’animal vers l’humain, tandis que les habitants de ces quartiers défavorisés paraissent avoir fait, du moins tel qu’il transparaît dans le traitement qui leur est réservé, le voyage en sens inverse. Ces parias urbains dont parle Le thé au harem d’Archi Ahmed et Banlieue noire ne sont en réalité rien d’autre que ces bêtes que la république tient muselés, tant leurs revendications sont passées sous silence et simplement ignorées. Pour expliquer cette situation, Achille Mbembe s’est interrogé sur la possibilité de caractériser la situation en cours dans la France contemporaine de palestinisation. Pour lui en effet,

Des traitements et formes d’humiliation qui n’étaient autrefois tolérés que dans les colonies refont aujourd’hui leur apparition en pleine métropole où ils sont appliqués, lors des rafles ou des descentes dans les banlieues, non seulement aux étrangers, migrants illégaux et réfugiés, mais de plus en plus, à des citoyens français d’origine africaine ou descendant des anciens esclaves africains. En d’autres termes, la conjonction est en train de s’opérer entre, d’une part, les modes coloniaux de contrôle, de traitement et de séparation des gens ; de l’autre, le traitement des hommes et femmes jugés indésirables sur le territoire français ; et enfin le traitement de citoyens considérés de seconde zone pour la simple raison qu’ils ne sont, ni des « Français de souche », ni des Français de « race blanche » (Mbembe, 2005).

En d’autres termes, s’il est indéniable qu’on ne peut accuser la France d’entretenir des colonies sur son territoire, le paradigme de la palestinisation reste pertinent et mérite d’être éclairé. En effet, il est important de souligner que les émeutes de l’automne 2005, à leur manière et décidément de façon plus décisive que la « marche des beurs » de 1983, auront révélé une guerre de représentation autour du passé et du présent de la France.

La grande question qui surgit de cet affrontement d’idées est en effet celle de savoir si la référence à l’héritage impérial est valable pour interpréter, comprendre et expliquer la discrimination raciale dont sont victimes les jeunes noirs et arabes, identiques à ceux dont il est question dans les fictions de Mehdi Charef et Thomté Ryam. Comme l’a remarquablement montré Florence Bernault (2009), le paradigme colonial a été l’objet de dissensions entre les historiens de la France contemporaine. Ainsi que le souligne l’historienne, il existe deux tendances face au passé colonial de la France. D’une part, des historiens qui estiment qu’il faut en finir avec l’alibi racial et même réhabiliter le colonialisme français suivant l’esprit de la loi du 23 février 2005 sus-évoquée, réfutant ainsi toute pertinence au modèle colonial comme grille d’analyse ; de l’autre, des chercheurs dont les travaux, notamment à partir de la publication par Nicolas Bancel, Pascal Blanchard et autres de La fracture coloniale (2005) et Zoos humains (2002), signalaient la nécessité de soumettre l’Histoire comme discipline à une prise en considération sérieuse du passé colonial de la France. Bernault montre bien dans son article comment la tension qui résulte de ces deux postures a contribué à rendre le discours bien souvent amnésique ou apologétique des violences coloniales. Evoquant d’abord la position du gouvernement français qui était d’encourager, sinon d’obliger les historiens à revisiter, mieux à réviser le passé colonial de la France pour en valoriser sa grandeur, puis le point de vue de la militante féministe Houria Bouteldja et son « Appel des Indigènes de la République », et enfin les prises de position de penseurs tels Pierre Tevanian, Saïd Bouamama, Jean-Loup Amselle et Achille Mbembe pour ne citer que certains noms, l’historienne tire une conclusion pertinente pour l’analyse que je propose dans cet article : le paradigme colonial.

Pour l’historienne, s’il est vrai que le paradigme colonial comme base d’interprétation des changements sociaux a été largement réfuté dans certains cercles académiques, politiques et même médiatiques en France, il reste que la question de l’immigration, ajoutée à celle de la race ou de l’ethnie, sont devenues des problématiques parmi les plus visibles et les plus importantes en France de nos jours. En conséquence, l’Histoire comme discipline n’est plus elle-même à l’abri de la nécessité d’une prise de position politique. En somme, Bernault martèle la nécessité de prendre en compte ce qu’elle nomme le « syndrome colonial » dans l’analyse des mutations et troubles sociaux qui ébranlent la France depuis la marche de 1983 jusqu’aux nombreuses émeutes que le pays des droits de l’homme a vu avoir lieu sur son territoire, et dont le point culminant du parallélisme fut la déclaration en 2005 de l’état d’urgence dans les banlieues françaises, ce qui n’était pas sans rappeler l’état d’urgence déclaré durant la guerre d’Algérie.

Sur ce point, je soulignerai la pertinence du retour au moment colonial comme point de départ. En effet, à la fois les peuples colonisés d’Afrique et leurs jeunes descendants constituent ce que Mathieu Rigouste a appelé « l’ennemi de l’intérieur ». Dans l’ouvrage éponyme, Rigouste étudie brillamment les figures de cet ennemi dans les institutions politiques et militaires, de même que « la production de doctrines de surveillances et de répression et évolution des institutions chargées du contrôle intérieur depuis la fin de l’empire français » (Rigouste, 2009 : 7).

Sur la prise en compte du syndrome colonial comme piste d’exploration ou de compréhension de la précarité des afro-descendants dans la France contemporaine, il faut relever que les romans de Mehdi Charef et Thomté Ryam n’en font pas exception. Si les allusions à l’Afrique dans Le thé au harem d’Archi Ahmed sont faites de manière très subtile dans la comparaison souvent nostalgique entre le pays d’origine et la terre d’accueil, ou dans la mise en relief des stéréotypes hérités de la colonisation et dont sont affublés arabes et noirs, elles sont très explicites dans Banlieue noire. L'évocation du pillage de l'Afrique dans ce roman suggère bien que la mise à l'écart des banlieues puise ses racines dans l'Histoire et le spectre de la domination coloniale. En plus de souligner l'étroite relation entre les deux périodes, coloniale et postcoloniale, le texte devient lieu de requiem des dirigeants africains qui ont péri pour avoir rêvé d'un dialogue d'égal à égal avec l'ancienne métropole coloniale, de même que des leaders des droits de l'Homme aux États-Unis: « Je ne peux pas dire toute la vérité : l'État qui est toujours sur écoute, m'abattrait, me détruirait comme Angela Davis, les Black Panthers, Sankara, Lumumba, Mathoub, ou Smith et Carlos... » (Ryam, 2006 : 145). Par ce geste, Thomté Ryam ne se contente pas d'écrire le présent des cités dans la France actuelle, il le met en perspective en rapport au passé de la France dans ses colonies et notamment en Afrique, attestant ainsi la remarque de l’historien Didier Gondola selon qui « there can be no doubt that the swelling number of the African Diaspora and the status of second rate citizens that indexes most Africans in France is attributable, albeit only partially, to the minorization of Africa » (Gondola, 2009 : 164). Le rapport qui existe entre le traitement des banlieues françaises de nos jours et la perception de l’Afrique par son ancienne tutelle coloniale est donc clair. Et l’on comprend également la disqualification dont sont victimes les citoyens français héritiers de l’immigration africaine.

Ainsi, pris dans l’étau de ce que François Dubet a appelé « la galère », et soumis à la construction publique de leur invisibilité qui est d’autant plus paradoxale qu’ils constituent précisément une minorité visible, les jeunes que décrivent les romans de Mehdi Charef et Thomté Ryam sont obligés d’inventer des tactiques de survie en attendant la reconnaissance d’un système dont ils sont membres à part entière mais qui les humilie et les pénalise constamment.

Ces jeunes personnages de romans ressemblent par bien des aspects aux jeunes désorganisés, exclus et enragés que décrit François Dubet dans La galère : « Ils sont peu intégrés, ils se sentent exclus et ils sont enragés parce que la domination subie n’a pas de sens » (Dubet, 1987 : 95). Il faut noter que ce constat qui date des années 1980 signale, au regard du roman de Thomté Ryam paru deux décennies plus tard, que rien n’a fondamentalement changé. L’exclusion dont sont en effet victimes Madjid et Sébastien les pousse à se protéger d’un monde extérieur hostile, et par conséquent, les place dans une situation de marginalité qui, le rappelle Dubet, « désigne l’action par laquelle des acteurs à la fois exclus et désorganisés créent une sociabilité plus ou moins volontairement isolée qui leur permet de survivre et de se protéger » (100). Ce constat du sociologue rend désormais plus intelligible l’irruption de la violence, de la drogue, et de la délinquance dans Le thé au harem d’Archi Ahmed et Banlieue noire. La société française apparaît ainsi dans les romans comme une sorte de jungle à l’intérieur de laquelle seuls les plus forts survivront et réussiront. La poétique du désespoir chez Charef et Ryam appelle donc à une éthique de la survie. Cela explique la propension dans les deux romans des jeunes pour la délinquance et le sexe. Or, au fond, ces jeunes ne demandent que le « droit d’exister », cette formulation étant empruntée à Lydie Moudileno.

Dans un remarquable article, Moudileno remonte à La nausée, de Jean-Paul Sartre (1938) qu’elle met au miroir de Les trafiqueurs, de Lucio Mad (1995) pour montrer que la préface sartrienne, au même titre que son roman précédemment cité, est largement tributaire d’une stéréotypie. Pour Moudileno donc, avec la préface sartrienne,

Se met en place un discours par lequel l’existentiel, en tant qu’angoisse et spéculation à partir de cette angoisse, relève d’une conscience strictement occidentale. Par contraste, l’être-dans-le- monde du noir, c’est sa négritude, qui relève, elle, de l’Être et d’un rapport non problématisé au réel. Parce qu’ils sont par essence, culture, race ou autre, en dehors, les Nègres de Sartre constituent, si ce n’est une autre espèce, en tout cas des exceptions à la problématique existentielle. Comme les morts, comme les personnages du roman, comme aussi cet insecte que Roquentin écrase entre ses doigts [dans La nausée (1938)], « ils se sont lavés », selon Sartre, du « péché d’exister » (Moudileno, 2002 : 86).

L'idée de plaidoyer pour le droit d'exister qui résume selon moi les romans de Mehdi Charef et Thomté Ryam et qui se situe en contrepoint de la permanence du désespoir et de l’oubli, renvoie d’une certaine façon à celle du « partage du sensible », théorisée par Jacques Rancière. Ce concept s'inspire du constat que s’il existe des catégories humaines qui ont accès au commun, c'est- à-dire, qui sont visibles, qui ont droit à la parole, d’un autre côté nous aurons ceux qui sont muets, à qui on conteste d'être visibles et parlants. Ainsi, le « partage du sensible » peut être défini comme « un découpage des temps et des espaces, du visible et de l'invisible, de la parole et du bruit qui définit à la fois le lieu et l'enjeu de la politique comme forme d'expérience. La politique porte sur ce qu'on voit et ce qu'on peut en dire, sur qui a la compétence pour voir et la qualité pour dire, sur les propriétés des espaces et les possibles du temps » (Rancière, 2000 : 14). Les jeunes habitants de la banlieue que montrent les romans ne demandent en effet pas plus que le « droit d'exister ». Leur rêve n'est pas tant d'échapper à la banlieue comme espace physique, que d'avoir des conditions favorables à leur émergence sociale.

En définitive, ce qui est donc problématique et heuristique dans la cartographie de la misère dont ces romans font l’étalage, est moins l'espace physique de la banlieue que sa stigmatisation par le discours dominant. Les personnages de Thomté Ryam et Mehdi Charef n'ambitionnent pas de s'installer à Paris, mais réclament plutôt d'être pris en compte dans le « partage du sensible » auquel j’ai fait allusion plus haut. Ces personnages se rendent compte de l'injustice dont ils sont victimes, ils déplorent leurs conditions de vie et le désespoir qui rythme leurs existences. Cependant, l'espoir demeure malgré tout possible car, de l’avis d’un personnage de Thomté Ryam en réponse à une question sur le potentiel des banlieues, « tant que vous avez un ami, une personne, qui vous pose ce genre de questions, c'est qu'il y a encore de l'espoir » (Ryam, 2006 : 123). Cet espoir d'échapper à la banlieue, c’est-à-dire de bénéficier de protections sociales et civiles, ne sera possible qu’à la condition d’une prise en considération réelle de ces jeunes citoyens français héritiers de l’immigration africaine, comme composante à part entière de la société française. En attendant ce futur hypothétique mais qui adviendra par la force du temps, les jeunes disqualifiés sociaux des cités françaises, à l’instar de ceux que donnent à voir Le thé au harem d’Archi Ahmed et Banlieue noire, continueront d’osciller entre visibilité et invisibilité, paroles muettes et silences. De la même manière, la poétique de leur désespoir se déploiera sans cesse entre Eros et Thanatos, entre les plaisirs du sexe omniprésents dans les romans avec leurs corollaires (alcool, prostitution, vol) et la mort qui résultera soit de l’ordre sécuritaire qui prêche la répression, soit de la violence autodestructive dans laquelle se situe cette jeunesse de France, coincée entre désespoir et enfermement.

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1Cet article s'inscrit dans le cadre d'une etude sur la diaspora africaine en France, projet finance par le Tower Center for Public Policy and International Affairs de la Southern Methodist University.

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